Après une élection controversée, le gouvernement d’Alexandre Loukachenko a apporté des amendements au Code criminel au cours de l’été 2021 afin de sanctionner les comportements jugés extrémistes. Ces modifications ont provoqué une vague de manifestations, au détriment des droits des Biélorusses.
L’ajout de l’organisation d’évènements publics à la liste des comportements extrémistes et criminels est l’un des changements les plus notables au Code pénal. L'État peut désormais bannir les manifestations et empêcher les médias d’en faire la couverture. D’autres éléments ont été annexés à la liste de comportements. Les propos haineux à l’endroit du président Loukachenko sont maintenant proscrits.
Le gouvernement a effectué ces changements pour contrer ses détracteurs et détractrices et les arrêter en ajoutant des éléments à la liste de comportements perçus extrémistes. En Biélorussie, le système de justice « est au service du pouvoir politique», explique Guillaume Grégoire-Sauvé, professeur en politique de la Russie et des autres États successeurs de l'URSS à l’Université du Québec à Montréal et cofondateur du Réseau québécois d’études postsoviétiques.
Des critères imprécis
Selon le Centre pour les droits de l’Homme Viasna, ONG en Biélorussie, en juin et juillet dernier, l’article 342 régissant l’organisation ou la participation à des actes visant à troubler l’ordre public a été utilisé pour arrêter 25 manifestants et manifestantes. « Le principe, c’est que les critères [pour qualifier une personne d’extrémiste] sont mal définis pour que le gouvernement soit en mesure de sévir contre ceux qui ne pensent pas comme lui », indique M. Grégoire-Sauvé.
« Certains détenus étaient choisis et marqués à l’aide de peinture par les autorités pour qu’ils reçoivent un traitement beaucoup plus dur. » -Tatsiana Ziniakova
L’ONG Human Constanta a récolté des chiffres alarmants auprès de la Cour suprême de la Biélorussie. Selon Tatsiana Ziniakova, analyste juridique au sein de l’ONG, 4200 dossiers criminels ont été ouverts contre des individus pour cause d’extrémisme et 30 000 manifestants et manifestantes ont été détenues depuis l’été 2020.
Les droits de la personne bafoués
Les instances gouvernementales de la Biélorussie ne s’en tiennent pas seulement aux arrestations. Des cas de tortures et de viols ont été rapportés dans les prisons et lors des manifestations. « Certains détenus étaient choisis et marqués à l’aide de peinture par les autorités pour qu’ils reçoivent un traitement beaucoup plus dur », soulève Tatsiana Ziniakova.
Selon Mme Ziniakova, ces mesures oppressives représentent « une entrave non négligeable aux droits humains ». Les sanctions en place font peur à la population et les empêchent de s’exprimer. La population est sous l’interdiction de se rassembler pour manifester. « [Ces mesures] vont à l’encontre des principes de base des articles 19 et 20 de la Déclaration universelle des droits de l’homme », indique l’analyste juridique. Ces segments stipulent que tout individu a le droit à la liberté d’opinion, d’expression et de réunion.
Un conflit qui dégénère
Le 28 septembre dernier, un conflit a éclaté alors qu’un officier du Comité de sécurité d’État (KGB), a été abattu par un opposant. Le tireur a par la suite été exécuté par les autorités policières.
Le décès du policier Dmitri Fedosiouk marque la première victime de cette crise politique au sein du corps de police. « Loukachenko a déclaré que “le crime ne restera pas impuni”, ce qui est drôlement formulé, considérant que le meurtrier est déjà mort », fait valoir Guillaume Grégoire-Sauvé. Toujours selon lui, les manifestants et les manifestantes devront s’attendre à plus de répression dans les mois à venir.
Photo: Malika Alaoui