Cela fait maintenant un an et demi que les femmes du collectif ImilliaSkate ont pris les rues de Cochabamba en Bolivie. Armées de leur planche à roulettes et arborant fièrement leurs habits traditionnels aymaras, elles s’occupent de promouvoir leur culture grâce aux réseaux sociaux.
« Nous nous sommes réunies pour la première fois en tant qu’Imillas en juin 2019 », explique Stefania Mor, membre fondatrice de l’organisation. « Notre but a toujours été de représenter et d’incarner la femme bolivienne à travers notre sport afin de fortifier notre culture », précise la jeune planchiste.
Pour rendre hommage à leur héritage, elles enfilent les vêtements traditionnels de leurs grands-parents, qui se composent d’un ample chemisier brodé, d’une jupe à carreaux appelée pollera et d’un chapeau melon.
« C’est sûr qu’on a besoin de temps et d’entraînement pour s’habituer, mais une fois qu’on maitrise les techniques, c’est là que ça devient amusant », exprime Stefania. Le contraste créé par les polleras, qui rappellent la vie rurale des Andes, et les planches à roulettes propres au milieu urbain, n’est pas passé inaperçu sur les réseaux sociaux. En effet, le groupe publie régulièrement des vidéos sur leurs différentes plateformes numériques. Ainsi, elles ont accumulé des dizaines de milliers de vues grâce à leurs pages Facebook, Instagram et, depuis tout récemment, TikTok.
« Promouvoir la culture aymara par le biais des médias sociaux numériques encourage les plus jeunes générations à découvrir leur culture », remarque Vicente Alanoca, anthropologue péruvien et militant aymara.
Il affirme qu’il s’agit de « l’outil idéal pour combattre l’assimilation et la disparition des communautés autochtones en Amérique du Sud ».
Bien que les réseaux sociaux favorisent souvent la circulation de discours haineux, M. Alanoca croit que l’utilisation de ces canaux de communication permet d’unir les communautés autochtones et, par le fait même, de coordonner plus efficacement les activités liées à leurs mouvements. « Dans ce cas-ci, l’avènement des réseaux sociaux permet à la population aymara de s’identifier fièrement au peuple, sans tenir compte des frontières restantes de la colonisation espagnole », remarque l’anthropologue.
Un sport traditionnellement masculin
Bien que la planche à roulettes ne soit pas une activité très répandue en sol bolivien, elle reste principalement dominée par les hommes. « Pour chaque fille qui fait du skate, il y a trois garçons [qui en font] », estime Daniela Santiváñez, qui fait également partie du collectif. « Mis à part mes amies du collectif, je pense que je peux compter sur mes doigts le nombre de filles qui font de la planche à roulettes à Cochabamba et à La Paz », ajoute-t-elle.
Afin d’encourager plus de femmes à s’impliquer davantage dans ce sport, elles ont mis en place, avec l’aide d’autres associations de planchistes, une mini-école où elles donnent des cours de planche à roulettes. « Nous tentons de rendre accessible la pratique de ce sport. Plus que tout, nous voulons servir de modèles aux filles de notre communauté », conclut Stefania.
Crédit-illustration: Camille Dehaene