Au Canada, la représentation de la population autochtone dans les prisons fédérales et provinciales surpasse largement celle de la population canadienne écrouée. Alors que les communautés autochtones ne se sentent pas interpellées par le système de justice, les centres de détention offrent peu de services adaptés à leur culture.
« Le système de justice blanc ne veut rien dire dans la culture autochtone », affirme le directeur général de l’Association des services de réhabilitation sociale du Québec, David Henry. Il explique que, dans la culture des Premières Nations, les termes « libération conditionnelle » ainsi que « procès » sont inexistants. Par le fait même, leur compréhension en est affectée dès le début du processus judiciaire, soutient-il.
« C’est illusoire de penser que notre système de justice répond aux besoins des Autochtones alors que tout manque », selon M. Henry. Ce constat résulte essentiellement de l’absence de normes adaptées à la culture autochtone. D’ailleurs, quand les Autochtones retournent dans leur communauté, « il n’y a pas les infrastructures [suffisantes pour] rassurer les commissaires [qui choisissent] d’accorder une libération conditionnelle », souligne-t-il.
Une problématique fédérale et provinciale
Selon le directeur adjoint des services parajudiciaires autochtones du Québec Pierre Lainé, l’adaptation des centres de détention aux communautés autochtones est insuffisante, bien qu’au fédéral, les centres tentent de développer des structures d’aide pour la clientèle autochtone. « Le fait qu’il y ait très très peu d’employés autochtones au Service correctionnel Canada dilue l’objectif à atteindre », souligne-t-il. Ainsi, malgré la bonne volonté des employés et employées canadiennes à l’égard des Autochtones incarcérés, ils et elles ne peuvent pas comprendre leur passé et donc ne peuvent pas les aider convenablement.
« L'idée est de vraiment s’attaquer à la problématique, mais pas uniquement le passé criminel du résident. On va loin dans l'enfance, dans les traumatismes passés. » - Brian Sarwer-Foner
« [Au provincial], les sentences sont de courtes durées, [deux ans et moins], il n’y a donc pas de temps pour entreprendre quoi que ce soit avec eux », rapporte Pierre Lainé. Peu de programmes et de services de réhabilitation sont offerts. De plus, M. Lainé dénonce un mécanisme problématique dans la situation des Autochtones, soit celui de l’incarcération des prévenus et prévenues, personnes en attente d’un jugement. « Le temps qu’ils font en dedans en attente d’un procès ne permet pas un travail avec eux », ajoute-t-il.
Tous les intervenants avec qui L'Apostrophe s'est entretenu pensent que l'une des solutions aux problèmes des Autochtones dans le milieu carcéral serait l’implantation de ressources d’aide à l’image du Centre de guérison de Waseskun qui favorise la réinsertion sociale des délinquants et délinquantes autochtones.
Cette réinsertion se fait en partie grâce à la guérison holistique rassemblant quatres grandes dimensions sur lesquelles les détenus et détenues sont tenues de travailler : la dimension physique, émotionnelle, mentale et spirituelle. « L'idée est de vraiment s’attaquer à la problématique, mais pas uniquement le passé criminel du résident. On va loin dans l'enfance, dans les traumatismes passés », souligne l’agent de liaison de la communauté de guérison de Waseskun, Brian Sarwer-Foner.
Photo: Magali Brosseau