Mouvement culturel contestataire apparu au milieu des années 1970, le punk fait son chemin au Myanmar à travers une communauté diffusant des idéaux de liberté. Sa popularisation concordant avec la démocratisation du pays, l’idéologie serait un outil d’expression du désir d’émancipation de la population birmane.
« Être punk, ce n’est pas s’habiller bizarrement et écouter de la musique bruyante. C’est de refuser de se conformer à la société ou au mode de vie traditionnel, c’est de s’attaquer au statu quo », déclare Sküm. C’est ainsi que le chanteur et fondateur du groupe punk birman Kultüreshock décrit l’idéologie du mouvement qui connaît un engouement au Myanmar depuis la dernière décennie.
Selon la candidate au doctorat en musicologie de l’Université de Montréal Catherine Harrison-Boisvert, la nature contestataire du punk permettrait d’assouvir, en plein contexte post-dictatorial, un besoin impératif de liberté. Celui-ci n’est évidemment pas ressenti à l’intérieur d’un climat politique plus démocratique. « Ici, le punk reste un peu underground, [...] mais il ne répond pas à cette même colère et se place donc plus facilement dans la catégorie du mainstream », explique-t-elle. Le mainstream se distingue de l'underground par sa plus grande accessibilité et acceptabilité sociale.
Le punk, outil de libération
Quand une volonté de changement politique s’exprime à travers une culture, l’impact de ce changement est amplifié: l’art est particulièrement efficace pour propager un message politique en raison de la dimension esthétique et émotive qui s’imprime chez l’individu. « Si on se sent interpellé par une musique en particulier, c’est parce qu’on pense qu’elle est capable de porter le message qu’on a envie de porter », souligne Mme Harrison-Boisvert.
Le chanteur de Kultüreshock est sceptique par rapport à l’influence qu’il pourrait avoir sur le climat politique, n’ayant pas l’impression que la démocratisation ait changé la perception qu’a la population birmane sur sa musique. Cependant, il soutient que son groupe est un exemple de l’influence de la politique sur les arts:
« Nous sommes insatisfaits et mécontents de ce monde de guerres et d’inégalités dans lequel nous vivons. [...] Nous exprimons notre rage à travers notre musique, et nous nous séparons, par le fait même, de notre société capitaliste et tout ce qu’elle représente. »
Même si son groupe est peu connu sur la scène birmane, Sküm admet avoir gagné une petite communauté fidèle de partisans et partisanes depuis sa formation en 2011.
Par ailleurs, Catherine Harrison-Boisvert souligne que la culture donne un sens à la société et est vitale à sa conscience collective. Sans la culture, « c’est tout un pan d’un peuple qui s'annihile. » En effet, l’identité punk donne une voix à toute une communauté birmane qui réclame la fin de l’oppression, et elle est plus prête que jamais à être entendue.
Photo par Julien Proulx-Lareau