L’Art Charter for Climate Action (ACCA), une initiative qui s’inscrit à l’intersection du secteur artistique et des enjeux environnementaux, sera présenté aux membres de la communauté artistique dans le cadre de la Biennale Arte de Venise en avril prochain.
L’ACCA est une initiative mise sur pied par quatre organismes qui œuvrent pour la transition écologique du milieu des arts. Elle veut soutenir l’adaptation du domaine artistique et l’orienter vers un mode de fonctionnement écologique, décrit l’assistante de recherche au sein de l’organisme à but lucratif ART 2030, Valeska Götz.
Dans le cadre du forum Hope présenté à la Biennale de Venise, les parties prenantes des entreprises seront invitées à prendre connaissance des engagements et à s’impliquer. Le regroupement invitera dans un deuxième temps des « détenteurs de connaissances sectorielles à travers le monde » tels que des artistes, des musées, des galeries et des industries commerciales à signer cette charte afin de s’engager à modifier leurs pratiques.
Au moment de l’entretien avec l’organisation ART 2030, les engagements précis que proposera la charte n’étaient pas encore établis.
La marchandisation de l’art
« [Il faut se questionner sur] le fait même qu’on ressent ce besoin de mettre sur pied des biennales pour célébrer l’art [...], que notre culture artistique soit organisée autour de la convoitise du rayonnement international, plutôt qu’à sa relation au territoire », explique Romain Monnereau, étudiant à la maîtrise en développement durable à HEC Montréal. Il réalise actuellement un essai sur la décroissance dans le milieu artistique et culturel.
La commercialisation de l’art et le « besoin » qu’elle génère de produire toujours plus d’œuvres, toujours plus d’évènements internationaux auxquels les individus sentent l’obligation de participer s’ils veulent faire partie de la culture artistique engendrent des conséquences éthiques et environnementales, soutient-il.
Bien que l’étudiant salue l'initiative ACCA et se réjouit de savoir que de tels projets gagnent en popularité dans l’espace artistique, la solution se trouverait selon lui plutôt dans un changement dans notre manière de voir l’art ; construire des récits différents qui se concentrent à l’échelle locale.
Des initiatives montréalaises
« On a un historique, un ADN à la Tohu, d’incorporer les enjeux environnementaux dans notre organisation qui se veut être un lieu culturel », explique le directeur des affaires institutionnelles de la Tohu et coprésident de la commission culture et transition écologique pour l’organisme Culture Montréal, Pablo Maneyrol.
Cette commission permanente désire « regrouper des gens du secteur culturel, des gens du milieu de l’environnement et de la recherche » pour réfléchir aux enjeux écologiques dans le milieu culturel de la province, avance le coprésident.
Un des sous-comités de travail se concentre justement sur la manière dont les arts peuvent créer de nouveaux récits qui s’ancrent dans la transition écologique. « On s’intéresse à l’artiste lui-même dans son propos, à comment il prend à cœur ces valeurs environnementales », énonce Pablo Maneyrol.
S’attaquer au cœur du problème
En se fiant à sa propre expérience, M. Maneyrol constate que des initiatives comme l’ACCA se concentrent plutôt sur « la coquille de l’enjeu plutôt que sur son cœur ». Il soulève qu’il existe une certaine crainte liée à l’instrumentalisation des artistes ou de l’urgence climatique lorsqu’on amène l’idée d’une charte d’engagement sur la table.
La commission désire plutôt se concentrer sur ce qui motive les artistes à incorporer les valeurs environnementales dans leurs œuvres et sur la manière dont les thématiques explorées dans ces dernières peuvent jouer un rôle actif dans la modification des récits communs.
Ceux et celles qui défendent cette vision avancent donc l’idée que si le respect de l’environnement devient une valeur partagée par la majorité des récits communs, les pratiques communes suivront et c’est ce qui permettra de diminuer de manière significative l’impact environnemental du milieu culturel.
Illustration : Allyson Caron-Pelletier