Originaire de Trinidad-et-Tobago, Tony est en situation d’itinérance depuis quelques mois et fréquente principalement le Quartier chinois.
« J’ai accès à une aide alimentaire ici et je suis un habitué de la Old Mission Brewery (OBM) », dit Tony. La Old Mission Brewery est un organisme d’aide aux sans-abris qui offre du soutien psychosocial, des programmes de prévention et des initiatives de relogement.
Pour Mei Chiu, coordonnatrice de la Table ronde du Quartier chinois, les communautés du Quartier chinois ont davantage en commun qu’elles le pensent. Elle souligne par exemple que la clientèle de l’organisme Résiste à la rue, qui distribue jusqu’à 150 repas gratuits chaque dimanche dans le quartier, est plus diversifiée que prévu.
« J’ai vu la file. Il y avait beaucoup d’aînés chinois, de jeunes étudiants, de demandeurs d’asile. L’insécurité alimentaire, c’est un enjeu qui ne touche pas seulement les personnes itinérantes. Ça touche tout le monde. »
Mme Chiu milite pour qu’un élan de solidarité et de collaboration se crée entre les diverses communautés du quartier. Elle souhaite qu’elles atteignent leurs objectifs communs, comme l’accès au logement, la sécurité physique et alimentaire, puis la revitalisation du quartier.
Il semble exister un sentiment de solidarité entre les personnes itinérantes du quartier, même si elles sont souvent en danger. D’après Tony, il arrive que la communauté itinérante du quartier se fasse frapper ou qu’on lui vole des vêtements et de la nourriture.
Andong Wang, artiste peintre et dessinateur depuis ses 16 ans, est aussi un habitué du secteur. Il a quitté la Chine pour étudier la gravure à la Faculté des beaux-arts de l’Université Concordia et s’est ensuite installé à Montréal.
Le résident du quartier affirme avoir été témoin de situations d’indécence ou de présence parfois dérangeante. Il souhaite que la Ville de Montréal installe des toilettes publiques pour éviter ce genre de tracas.
Le comportement de certains groupes du quartier face aux enjeux de cohabitation désole Mei Chiu : « Les personnes logées sont tannées d’avoir des personnes en situation d’itinérance devant leur porte. Ils font des plaintes. Les gens sont très émotifs, ils s’en fichent des solutions, ils ne veulent que dénoncer. »
« L’enjeu de la cohabitation est une crise tellement répandue. Ce n'est pas juste dans le Quartier chinois », affirme Mme Chiu.
À quelques pas du studio d’art d’Andong Wang se dresse la plus ancienne manufacture du quartier. Cet immeuble, classé bien patrimonial en juillet 2023, est exploité depuis les années soixante par l’entreprise Nouilles Wing, le principal fabricant de produits alimentaires orientaux au Québec.
Le bâtiment a été vendu en 2021 à des investisseurs non-chinois, ce que Mei Chiu déplore. Elle aimerait que la Ville de Montréal aide financièrement la communauté du Quartier chinois à acquérir l’immeuble Wing Noodles afin que le patrimoine chinois montréalais reste entre leurs mains.