À la suite de plusieurs années à négocier la reconnaissance de la participation des Métis au cours de conflits armés, la Nation métisse de la Saskatchewan a dû préciser que les anciens combattants étaient en fin de vie pour que le gouvernement fédéral reconnaisse leur participation et les indemnise.
Cette reconnaissance, pourtant appréciée des Métis de l’ouest du Canada, ne satisfait pas le directeur-chef des Vétérans et des Aînées de l’Alliance autochtone du Québec, Roger Robidoux. La somme de 20 000$ octroyée à une dizaine de familles de vétérans décédés ou au vétéran lui-même «n’équivaut même pas à un an de salaire», précise-t-il. M. Robidoux soutient qu’un soldat qui termine son service militaire en santé est considéré comme un héros, contrairement à un soldat malade qui est plutôt vu comme étant un poids pour le gouvernement. Le directeur-chef explique que les avantages offerts après les guerres n’ont pas été conçus de manière à aider les anciens combattants métis de façon efficace. De son côté, le gouvernement a ajouté être désolé du retard d’un quart de siècle avant que des actions soient finalement entreprises.
Selon M. Robidoux, les États-Unis offrent une meilleure justice que le Canada, même si leurs mentalités se ressemblent beaucoup. En effet, les États-Unis ont des associations métisses qui permettent aux Métis de bien se défendre en cour lorsqu’il est temps de revendiquer leurs droits. Au Canada, il n’y a pas de telles associations. «Il y a des projets qui sont pilotés par les Autochtones, mais souvent, ça prend le levier juridique», explique le professeur à l’Université du Québec à Montréal et expert de la politique canadienne et des Autochtones, Nicolas Houde.
Le jeu des tribunaux
Il est difficile pour les Métis d’obtenir toutes les demandes afin de se faire différencier des autres groupes, car ils sont obligés de passer par les tribunaux. Ceux-ci vont jusqu’à communiquer avec les plaignants métis pour savoir s’ils veulent apporter des changements à leurs droits, comme l’affirme M. Houde: «Ce sont beaucoup les tribunaux aussi qui forcent le gouvernement à faire des changements [...], de là à dire qu’ils prennent vraiment le leadership [pour] faire changer les choses, je ne suis pas certain». Le gouvernement «joue avec le temps» pour éviter de faire des concessions à ces combattants, continue le professeur.
La majorité des demandes de différenciation se font refuser dès l’évaluation du cas faite par la cour de première instance, où les causes sont entendues pour la première fois. Par la suite, «il faut attendre deux, trois ans avant que ce soit entendu [en Cour d’appel], et pendant ce temps-là, le soldat n’a pas le traitement qu’il mérite», rappelle M. Robidoux. Les vétérans métis ne sont pas très accompagnés, certains sombrent même dans la dépression pendant le processus. D’autres doivent composer avec une attente trop longue et des demandes qui tombent dans l’oubli. Parfois, certaines demandes se retrouvent en cour de seconde instance, mais elles connaissent toujours la même fin: les demandeurs se retrouvent en négociations avec le gouvernement, négociations qui peuvent durer jusqu’à une dizaine d’années, se désole M. Robidoux.
Photo par Andrijko Z., wikicommons