En Bolivie, tandis que la COVID-19 bat son plein dans le monde, la partie de la population qui vit à de hautes altitudes réagit différemment face au virus: elle y semble presque immunisée.
Plusieurs analyses épidémiologiques suggèrent que les mécanismes physiologiques développés par les personnes habitant à de hautes altitudes permettraient de les protéger d’une infection aiguë par le virus SRAS-CoV-2.
« Les personnes vivant dans ces régions ont développé des mécanismes respiratoires, cardiovasculaires, hématologiques et cellulaires qui leur permettent de capturer plus d’oxygène dans l’air, de le transporter dans le sang jusqu’aux cellules plus efficacement et de produire plus d’énergie en utilisant moins d’oxygène », explique Christian Arias-Reyes, scientifique de l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec (IUCPQ), et auparavant chercheur associé à l’Université supérieure de San Andrés à La Paz.
La Paz, située entre 2400 et 4000 mètres d'altitude, est la plus haute capitale administrative du monde. La plus grande partie de sa population métropolitaine est située en haute altitude et a développé ces caractéristiques, ce qui pourrait les prémunir contre la COVID-19.
Le rôle de l’altitude sur la transmission
Des chercheurs et chercheuses ont remarqué que la transmission du virus à une altitude de plus de 3000 mètres était trois fois plus faible qu' à une altitude inférieure à 1000 mètres. Cela expliquerait pourquoi, dans les hautes terres de la Bolivie, la pandémie s'est développée plus lentement que dans le reste du pays.
« L’hypothèse d’un risque moins élevé de contagion dû à une concentration plus faible de la protéine ACE2 dans les cellules des voies respiratoires conviendrait bien avec les données déjà récoltées », constate M. Arias-Reyes. Le virus s'accroche aux récepteurs ACE2 à la surface des cellules, donc s’ils sont moins présents, le virus le serait aussi.
D’autres fonctions physiques spécifiques à l’environnement pourraient aussi jouer un rôle dans la baisse de la transmission du virus, comme les rayonnements ultraviolets (UV), plus présents à de hautes altitudes.
« Les radiations d’UV détruisent l’ADN viral, et donc diminuent la durée de vie du virus quand il est attaché à des surfaces inertes. Ils agissent donc comme un désinfectant naturel », précise le chercheur.
Ces rayons sont aussi nécessaires pour produire de la vitamine D, qui a été suggérée comme protection contre les symptômes de la COVID-19.
Des mesures sanitaires particulières
Le pays a dû s’équiper de matériel médical adapté, en raison des hauts plateaux présents, pour faire face aux symptômes les plus sévères de la maladie. « La majorité des équipements médicaux, incluant les respirateurs, disponibles sur le marché sont actuellement testés au niveau de la mer », explique Mohammed Mostajo-Radji, l’ancien ambassadeur bolivien pour la science, la technologie et l’innovation. Ce manque de standards spécifiques à la haute altitude a pour conséquence que la majorité des équipements médicaux sur le marché ont des dysfonctions majeures dès qu’il faut les utiliser à une hauteur supérieure au niveau de la mer.
Crédit-photo: Lila Dussault