« Ça y est, j’abandonne tout, j’achète une vieille maison en Nouvelle-Écosse et je deviens pêcheuse. » Cette phrase, j’ai dû la prononcer au moins une fois par semaine depuis le début de la pandémie, au printemps dernier.
Au-delà du fait que cette affirmation s’inspire de la tendance généralisée vers la simplicité volontaire, et passée la réalisation qu’une cabane néo-écossaise est la seule propriété que mon portefeuille de génération Z pourra jamais se permettre, il y a une autre conclusion à tirer de ce cri du coeur pour la campagne: la pandémie pousse les gens à aller vivre ailleurs.
Les banlieues de Montréal ont connu une explosion de 41% des ventes de maisons entre juin et août 2020.
Le télétravail a permis à une quantité importante de Montréalais et Montréalaises de s’échapper de la grande ville; leur enthousiasme a fait exploser le coût médian des propriétés pour atteindre une augmentation de 56% par rapport à l’année précédente à Mont-Tremblant, dans les Laurentides.
Malgré les restrictions de déplacement, les déménagements interprovinciaux ont été plus nombreux qu’à l’année dernière au Québec. Et alors qu’à l’habitude, le nombre de personnes sortant de la Belle Province écrase celui des personnes entrantes, on ne note pour l’année 2020 qu’une mince perte de 1238 habitants, un record depuis la période 2003-2004. La raison? Un nombre jamais vu, depuis le début de la comptabilisation, de personnes arrivant dans la province.
Incompatibilité du logement ou envie d’aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs? Qu’est-ce qui convainc une famille de déménager? Fixer les mêmes murs pendant plusieurs mois consécutifs a de quoi donner envie de fuir sa tanière aux plus casaniers d’entre nous. Chez d’autres, l’isolement a pu réveiller un esprit d’aventure enfoui sous l’enchaînement des semaines de 40 heures.
La réponse se trouve peut-être dans la définition de chacun de ce qui rend un endroit agréable. Si l’on interroge les innombrables Québécois et Québécoises qui se sont réfugiées en Gaspésie, aux Îles-de-la-Madeleine ou dans le Bas-Saint-Laurent cette année, ils et elles nous répondront peut-être que c’est la nature. Le train de vie, le grand air, l’espace.
Si l’on pose la même question aux nombreux Américains et Américaines qui, en 2020, se sont tournées vers Internet pour savoir comment devenir citoyens canadiens, ils et elles nous parleront sans doute de l’importance d’une vie politique saine et d’un système de santé accessible. Juste avant les élections américaines du mois de novembre, Radio-Canada rapportait aussi la popularité grandissante du site web Cape Breton if Donald Trump Wins (Le Cap-Breton si Donald Trump gagne), une création humoristique datant de 2016 qui vise à inciter la population américaine à s’établir en Nouvelle-Écosse.
Seul le temps pourra nous dire si la pandémie aura été un vecteur de migration. Et, à son tour, seul l’avenir pourra me dire si mes voisins néo-écossais seront américains, québécois ou simplement natifs de la presqu’île atlantique.
Crédit-photo: Ruth Troughton | Unsplash