En réponse à l’espace grandissant des changements climatiques dans le débat public, certaines personnes misent sur les changements politiques et d’autres les jugent non nécessaires. Ils et elles voudraient plutôt compter sur l’ingéniosité et les riches philanthropes pour nous guider hors de la crise à grand coup d'innovations technologiques. C’est toutefois illusoire de penser que ça nous sauvera.
Depuis quelques années déjà, un immense amas de déchets presque trois fois plus grand que le Texas, communément appelé « le continent de plastique », flotte au nord de l’océan Pacifique… Rassurez-vous, en 2013, le jeune prodige Boyan Slat a lancé l’organisation à but non lucratif (OBNL) The Ocean Cleanup. Le bateau, armé d’un système de nettoyage que M. Slat a lui-même conçu, va pouvoir s’attaquer au continent de plastique.
Dans un article de USA Today paru en octobre dernier, le fondateur de l’OBNL expliquait que, avec les moyens qu’elle a actuellement, l'organisation serait capable de ramasser entre 10 et 16,5 tonnes de déchets par semaine. Le continent contient 88 000 tonnes de plastiques, et les déchets ne cessent de s’accumuler. Cependant, on sait que la quantité de plastique rejetée dans les océans chaque année est d’environ 8 millions de tonnes et qu’une partie importante est mélangée au continent. Considérant la magnitude de ces chiffres, c’est utopique de penser qu’Ocean Cleanup arrivera à régler le problème.
Vision tunnel
Pour plusieurs, le milliardaire américain Elon Musk, qui s’est déjà comparé au super héros Iron Man dans une entrevue avec The Guardian, incarne l’archétype de l’élite philanthropique qui souhaite sauver le monde.
Elon Musk a créé en 2017 la société The Boring Company qui veut commercialiser des tunnels souterrains pour régler le problème de congestion automobile dans les métropoles qui est très polluante. Le milliardaire a initialement annoncé, en 2017, que les véhicules des citoyens circuleront à une vitesse de 241 km/h dans des tunnels qui permettront d’éviter les engorgements routiers.
L’ingéniosité humaine a certainement un rôle à jouer dans la lutte contre les changements climatiques. Toutefois, le système de Boyan Slat ne peut agir seul et les tunnels d’Elon Musk ne sont que poudre aux yeux : seuls, ils ne peuvent avoir de réels impacts sur la lutte contre la crise écologique.
Cette invention n’est en rien miraculeuse : la vitesse maximale atteinte lors de la première démonstration était trois fois plus lente que promise, remettant ainsi en question l’utilité de la dernière lubie d’Elon Musk. « C'est important de se souvenir qu'un métro ou un train peut transporter des centaines de personnes à la fois plutôt que juste quatre adultes dans une Tesla », a rappelé Cyrius Farivar, un journaliste d’enquête qui suit de près les activités de la compagnie Boring, lors d’un reportage pour CNBC news.
L’ingéniosité humaine a certainement un rôle à jouer dans la lutte contre les changements climatiques. Toutefois, le système de Boyan Slat ne peut agir seul et les tunnels d’Elon Musk ne sont que poudre aux yeux : seuls, ils ne peuvent avoir de réels impacts sur la lutte contre la crise écologique. L'innovation est, comme dans ces deux exemples, insuffisante. Les gouvernements doivent faire de plus grands efforts pour affronter les problèmes environnementaux sans se reposer sur des inventions encore embryonnaires.
Photo: Naja Bertolt Jensen, Unsplash