Fondé il y a moins de deux ans au Royaume-Uni, le groupe Extinction Rebellion a rapidement fait parler de lui et il continue de grandir, avec un nombre d’adhésions de plus en plus nombreux à travers le monde. L’organisation semble toutefois avoir du mal à influencer les décisions gouvernementales.
Occupation d’une plateforme gazière en Écosse ou irruption au Salon de l’auto de Montréal, les militants de XR n’hésitent pas à enfreindre la loi pour défendre tout ce qui touche au réchauffement climatique.
Le but de toutes ces actions est de promouvoir les objectifs dont Extinction Rebellion UK s’est doté :
- Déclaration officielle de l’urgence climatique
- Arrêter les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2025
- Créer une assemblée citoyenne sur le climat et la justice écologique
Si un an après la création du mouvement, le 1er mai 2019, le Parlement britannique a reconnu l’urgence climatique, ce geste symbolique n'a pas été accompagné de mesures suffisantes pour XR. Le Royaume-Uni table sur une réduction de 80% de ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050, mais aucun projet de loi sur une assemblée citoyenne n'a été déposé au Parlement.
Entre action et sensibilisation
Pour faire pression sur le gouvernement, Extinction Rebellion mise sur la désobéissance civile. Il s’agit d’une méthode de revendication non violente qui se traduit par le refus d’appliquer une ou plusieurs lois, en bloquant une route, par exemple. Pour le professeur à l’Université du Québec à Montréal et membre fondateur du Groupe de recherche sur les imaginaires politiques en Amérique latine (GRIPAL), Ricardo Peñafiel, « l’idée derrière les actions directes c’est de dire que les gouvernements représentatifs ne respectent pas le contrat, qui est de servir la population, et donc que leurs lois ne sont plus légitimes ».
Le groupe justifie aussi sa stratégie par les travaux de deux politologues américaines, Erica Chenoweth et Maria J. Stephan. Selon elles, il ne faudrait que 3,5% de la population s'engage dans des formes d’actions non violentes pour entamer une révolution, d'après leur ouvrage Why Civil Resistance Works.
Cette solution permet d'attirer de plus en plus de militants voulant poser des gestes concrets, comme Samuel, 21 ans, qui participe aux réunions de XR Montréal : « J'en ai marre de me plaindre et d'attendre que le gouvernement change quelque chose. Le but pour moi c'est de leur mettre de la pression. »
Le mouvement veut aussi sensibiliser les citoyens à la cause environnementale, comme le précise Elza Kephart, cinéaste et co-fondatrice de la branche québécoise du mouvement: « On fait énormément de sensibilisation, de présentations, ou des cercles d'écoanxiété. On prépare également en ce moment une campagne de boycott. Les swarms et die-in sont également des actions plus rassembleuses. »
XR, encore marginal
Même si le mouvement compte 100 000 militants à travers le monde, il reste loin derrière d’autres groupes environnementaux, comme Greenpeace et ses trois millions de membres. Sa radicalité pourrait même lui nuire. La police britannique avait notamment classé l'organisation dans sa liste de terroristes. Face au tollé que cela a provoqué, les autorités ont fait marche arrière, plaidant une erreur de jugement. Une criminalisation qui, selon M. Peñafiel, vise à « engendrer l’impression que manifester est illégitime ».
Ultimement, la légitimité du mouvement pourrait venir du soutien d’intellectuels qui, tout autour du globe, ont signé une lettre défendant le mode d’action d’Extinction Rebellion, sans parler des nombreuses voix qui s’élèvent en faveur de la lutte pour le climat. Reste à voir où XR se situe dans cet échiquier complexe.
Photo par Markus Spiske, unsplash