La marque italienne Gucci a été l’auteure de nombreux scandales d’appropriation culturelle au cours des dernières années.
Lors de la Fashion Week à Milan en 2018, des mannequins blancs avaient défilé en portant sur leur tête un dastar, un turban sikh, engendrant de vives réactions de la communauté sikhe. Cette dernière a dénoncé l’utilisation de ce symbole religieux comme simple accessoire, d’autant plus qu’il a été porté uniquement par des individus à la peau blanche.
Un an plus tard, lors du Mois de l’histoire des Noirs, la marque a dû retirer de son site web un chandail à col roulé noir pouvant couvrir le bas du visage à la façon d’un cache-col. Le trou ourlé de rouge se plaçant au niveau de la bouche donnait l’illusion de lèvres surdimensionnées, s'apparentant ainsi à un blackface. Le blackface est la représentation caricaturale de certains traits spécifiques aux personnes noires et a longtemps été exploité afin de les persécuter. Le chandail a déplu à la communauté afro-américaine, qui s’est indignée contre l’ignorance de Gucci.
Appréciation ou appropriation culturelle?
D’abord, il faut comprendre que l’appropriation et l’appréciation d’une culture sont deux concepts diamétralement opposés. D’une part, l’appréciation culturelle est la découverte d’une culture et de ses éléments, et ce, dans un contexte de respect et d’apprentissage.
D’autre part, l’appropriation culturelle est l’utilisation de certains éléments d’une culture sans s’informer des conséquences de cet usage. Elle est le fait de réduire une culture à des stéréotypes et de tirer un bénéfice personnel de l’exploitation de ces stéréotypes, par exemple dans un but commercial ou de divertissement. Bien que cette appropriation peut parfois être faite de façon involontaire ou sans mauvaises intentions, ses impacts sont néfastes pour la communauté qui la subit.
Cela dit, la marque de mode Gucci ne semble pas distinguer correctement ces deux concepts et multiplie les faux pas. Un objet traditionnel peut être interprété de façon arbitraire et incorrecte par les designers ; l’objet se retrouve donc complètement transformé et perd de sa symbolique culturelle. En outre, les objets sont généralement appropriés dans un but commercial, ce qui engendre une certaine polémique lorsqu’il n’y a pas de distribution équitable des profits générés par le produit.
Il est concevable de s’inspirer d’une culture pour en créer une pièce artistique ou une mode à des fins commerciales, mais tout est dans l’approche. Au Canada, la Maison Simons a prouvé qu’une telle entente est possible. En collaboration avec Indigenous Fashion Week Toronto (IFWTO), l’entreprise a fait appel à huit artistes autochtones issus de communautés canadiennes afin de créer une collection mettant en valeur le savoir-faire artisanal des Premières Nations, tout en produisant des pièces de vêtements urbaines et fashion. C'est un modèle dont Gucci pourrait s'inspirer pour faire preuve de plus de sensibilité envers les communautés et être fidèle à la symbolique culturelle ainsi qu’aux enjeux associés à celles-ci.
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