Avoir des tics nerveux, souffrir d’ une dépendance à la caféine, ne pas voir le temps passer, avoir des acouphènes, penser à beaucoup d’idées, être distrait et avoir peu d’estime de soi font partie des symptômes énumérés par les vidéos de l’application pour diagnostiquer le trouble de déficit de l’attention avec hyperactivité. Pourtant, ces caractéristiques parfois banales s’appliquent à une pléthore de maladies.
Des contenus concernant la santé mentale se glissent de plus en plus parmi les milliards de courtes vidéos de l'application TikTok. Au début de l’année 2023, le mot-clic #MentalHealth comptait près de 73 milliards de vues en tout, preuve de l’intérêt qui lui est accordé sur la plateforme et le mot-clic #autodiagnostic comptait pour sa part une dizaine de millions de vues.
Dans cette vague de vidéos, un type inquiète particulièrement les professionnel.les de la santé : celles qui contiennent des autodiagnostics. Certaines tiktokeurs et tiktokeuses proposent des jeux-questionnaires ou du contenu auquel on peut s’identifier dans le but de se créer une communauté qui leur ressemble.
Les utilisateurs et utilisatrices proposent aussi des façons accélérées de se reconnaître dans des diagnostics tels que la dépression, l’anxiété généralisée, le trouble bipolaire, voire l'autisme. Ces constatations ne sont toutefois pas une panacée pour une démarche psychologique. La détresse ressentie ne disparaît pas une fois la vidéo terminée.
Sans compter que ces discours sont souvent mis en ligne par de faux professionnels de la santé mentale, qui n’ont pas toutes les compétences nécessaires pour poser ce type de diagnostics. On y voit entre autres des « coachs en traumatismes», des « motivateurs personnels» ou tout simplement des influenceurs et influenceuses qui n’ont aucune qualification.
Une détresse difficile à calmer
Au Québec, seuls les médecins, les psychiatres ou les neuropsychologues peuvent établir un diagnostic officiel. Si aussi peu de personnes ont le droit d’établir un diagnostic de maladie mentale, c’est parce que les erreurs peuvent avoir des conséquences négatives sur la vie de la personne en question.
Il nous apparaît donc essentiel de rendre l’accès aux soins en santé mentale plus accessible, y compris financièrement si l’on veut apaiser la détresse des jeunes, toujours plus élevée qu’avant la pandémie. Au Québec, à la fin de 2022, environ 20 000 personnes étaient en attente pour obtenir des soins en santé mentale. Pourtant, les gouvernements investissent déjà. Par exemple, la ministre de l'Enseignement supérieur, Pascale Déry, a annoncé récemment la création de l’Observatoire sur le bien-être et la santé mentale étudiante en enseignement supérieur. Celui-ci coûtera au Québec 2,8 millions de dollars sur cinq ans.
On espère voir des changements plus radicaux à l’échelle de la province, pour permettre aux personnes qui ont besoin de soins de trouver du réconfort auprès de vrais professionnels de la santé.
Illustration: Magali Brosseau