Le Centre Pompidou est devenu la première institution française en février 2023 à faire l’acquisition d’œuvres numériques dont 16 NFT, des œuvres immatérielles (de l’anglais non-fungible token, c’est-à-dire jeton non fongible). Plusieurs chroniqueurs et chroniqueuses ont pourtant annoncé la mort prématurée des NFT à la suite d’une étude de dappGambl.
Depuis l’exposition du Centre Pompidou, plusieurs institutions, comme la Monnaie de Paris et le musée Granet d’Aix-en-Provence, se sont à leur tour dotées de NFT pour garnir leur collection permanente. Malgré cette vague d’affection pour les NFT, une étude de dappGambl a révélé que près de la totalité des jetons non fongibles ne valent plus rien.
Parmi 8500 collections de NFT de marque, dont CryptoPunks, 18 % valent maintenant 0 $ et 41 % valent entre 5 $ et 100 $.
Art ou cryptomonnaie?
Les NFT, à la croisée des chemins entre art et cryptomonnaie, ont d'abord été utilisés pour leur possibilité d’investissement. Chaque NFT est vendu et acquis grâce à un acte de propriété protégé par la technologie blockchain.
La valeur monétaire d’un NFT est établie par l’approbation du public et l’offre et la demande. L’un des exemples les plus connus est « Everydays: the First 5000 days » par Beeple un NFT vendu pour 69 millions de dollars en 2021. Il s’agit d’un collage de 5000 images réalisées par l’artiste.
Or, quand les chroniqueurs et les chroniqueuses critiquent la valeur des NFT, ils critiquent la valeur financière en tant qu’investissement. La valeur d’un NFT ne se limite pas à sa valeur financière et ce serait grossier de limiter ces derniers à cela. Par exemple, les artistes peuvent maintenant utiliser les NFT comme plateforme numérique pour monétiser et distribuer leurs œuvres de manière sécurisée et transparente. Ils représentent également un médium aux possibilités infinies pour les artistes.
Trop tôt pour déclarer la fin des NFT
Pour comprendre l’impact des NFT dans le monde artistique, il faut d’abord connaître l’importance de l’unicité dans l’achat et la revente d'œuvres. La Mona Lisa vaudrait beaucoup moins si Da Vinci en avait créé des millions de copies. Le caractère unique de l'œuvre étant un argument de vente majeur, les artistes des médias numériques étaient nécessairement désavantagés quant à la valorisation de leur art, puisqu’on pouvait les recréer à l’infini.
Avec l’arrivée des NFT, les artistes numériques ont trouvé une manière de rendre chacune de leurs œuvres uniques. Impossible de les recréer, la technologie l’empêche. Pas si mal comme concept!
Les collectionneurs et collectionneuses d’art se sont rapidement emballé(e)s. Les prix ont gonflé et la spéculation a pris des proportions ridicules. Comme de fait, la bulle a éclaté. Des œuvres qui valaient des millions il y a un an n’en valent que quelques centaines maintenant. Des journaux comme le Journal de Montréal annoncent désormais « la fin des NFT », comme si l’on parlait d’une banale cryptomonnaie.
Pourtant, les NFT ont fait leur bout de chemin. Certains artistes numériques sont maintenant solidement reconnus dans leur milieu. Le changement de mentalité qu’ont amené les NFT est une révolution fondamentale dans le monde de l’art, et son impact continuera de se faire sentir dans les années à venir. Comme dirait l’autre, les NFT sont morts, vive les NFT.
Illustration : Camille Enara Pirón