En novembre dernier, une entente de cessation des hostilités a été conclue dans la région du Tigré en Éthiopie, où une guerre civile faisait rage depuis deux ans. Le nombre de victimes, parmi lesquelles on compte près de 600 000 morts, met en lumière l'importance de trouver une solution durable pour la paix et la stabilité de l'Éthiopie.
« Je crains malheureusement qu’il n’y ait pas de paix à pérenniser », déclare Sonia Le Gouriellec, docteure en science politique et spécialiste de la Corne de l’Afrique. Selon la spécialiste, malgré une apparence de stabilité et de paix maintenue grâce aux efforts du gouvernement, l’Éthiopie demeure très fragile.
Le conflit a débuté en 2020 lorsque le premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a décidé d'annuler les élections régionales en raison de la pandémie de COVID-19. Les dirigeants tigréens ont tout de même décidé d’organiser l'événement, ce qui a entraîné une forte réaction du gouvernement central.
Actuellement, une administration intérimaire gère la région du Tigré en attendant la tenue de nouvelles élections. Cependant, le processus électoral est suspendu jusqu'à ce que la situation se stabilise dans la région.
Un manque de soutien
Selon leur site officiel, l’Union africaine (UA) a pour but de « promouvoir et de défendre des positions africaines communes sur les questions d'intérêt pour le continent et ses peuples», un objectif qui d’après Patrick Ferras, président chez Stratégies africaines et docteur à l'Observatoire de la Corne de l'Afrique, n’aurait pas été atteint: « l’Union africaine, c'est un ramassis de cancres qui n'ont rien fait! », exprime-t-il.
Les effets de ce conflit sur la population sont dévastateurs : des massacres, des déplacements forcés, des viols massifs de femmes et d'enfants et la famine. Les tensions avec les pays voisins, notamment le Soudan et l'Érythrée, qui sont impliqués dans le conflit, ne font qu'aggraver la situation. Malgré les appels à l’aide à l’international, l’UA ne se montre pas réactive.
« On engage, on mobilise et puis on enterre, quoi, c'est tout », affirme Patrick Ferras, déçu du désintérêt populaire et de la sous-représentation des enjeux touchant cette région.
Jouer le jeu
Selon M. Ferras, la situation serait tout de même en voie de s’améliorer, bien que certaines conditions s'imposent. Il faudrait d’abord rendre justice aux Tigréens et Tigréennes pour les dommages qu’ils et elles ont subis lors de la guerre, puis leur permettre de retrouver une vie politique qui leur est propre.
« Les gens attendent cette élection pour savoir si la paix va être réellement possible à pérenniser, explique l’expert, mais, pour moi, la paix est gérée et elle est sur la bonne voie parce que tout le monde essaie de jouer le jeu ». À son avis, afin de préserver une atmosphère pacifique dans la région, le gouvernement doit jouer le jeu, c’est-à-dire, résoudre les conflits régionaux, garantir la sécurité ainsi que les droits de la population. Il doit aussi garder l’œil ouvert quant aux autres régions éthiopiennes qui possèdent toujours leurs propres petites armées.
Illustration: Camille Enara Pirón