Une vidéo mettant en vedette Donald Trump a fait le tour des réseaux sociaux le 6 octobre dernier; on peut y voir le président des États-Unis annoncer qu’il a éradiqué le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) de la surface du globe. Or, le président des États-Unis n’a jamais prononcé ces paroles et tourné cette vidéo.
L’hypertrucage, ou deepfake en anglais, est un procédé utilisant l’intelligence artificielle (IA) pour produire une image. Grâce à une base de données comprenant des photos et des vidéos, une IA peut créer une image de toute pièce et la superposer à une vraie photo. L’animateur spécialisé en technologies à Radio-Canada, Matthieu Dugal, utilise l’exemple de la compagnie montréalaise Lyrebird, qui a mis en place, en 2018, un logiciel de transformation de la voix permettant de «copier la voix de quelqu’un et [de] lui faire dire ce que l’on veut.»
Procédé apparu en 2008 au cinéma, le deepfake s’est rapidement démocratisé sur le web et l’industrie pornographique s’est emparée de cette technologie pour métamorphoser le visage de certaines actrices. Souvent utilisé pour porter atteinte à la réputation de célébrités, le phénomène, appelé pornodivulgation, ou revenge porn en anglais, cause encore des dégâts un peu partout. Dans l’un de ses récents articles, Alexandre Sirois, éditorialiste à La Presse, explique qu’en Inde et en Belgique, des journalistes et des politiciens ont aussi été la cible de trucages désobligeants et mensongers dans le but de diminuer leur crédibilité. L’an dernier, un deepfake de sensibilisation mettant en vedette le réalisateur Jordan Peele transformé en Barack Obama est devenu viral, avec plusieurs millions de vues.
Les limites du trucage
En 2019, même un deepfake de qualité n’est pas très difficile à démasquer, car les technologies de trucage de voix et de visage qui sont accessibles ne sont pas parfaites. M. Dugal explique qu’il s’agit d’une période de transition : «La technologie existe, mais elle n’est pas encore assez au point pour tromper les gens, même si l’on sait que cela va se produire un jour.»
Dans le même ordre d’idées, M. Sirois, affirme que «les exemples de Barack Obama ou encore de Donald Trump doivent nous préoccuper, puisqu’ils nous font prendre conscience de ce qui risque de se produire dans un avenir proche.»
Petit à petit, ce genre de trucage vidéo devient de plus en plus connu. La fausse vidéo de Donald Trump a surtout été utilisée dans le but de sensibiliser la population au fait qu’il ne faut pas croire tout ce qui se trouve sur le web. Selon Alexandre Sirois et Matthieu Dugal, la solution passe par la lutte contre la désinformation à l’aide de médias crédibles et de logiciels créés pour démystifier le vrai du faux. Le phénomène des deepfakes rappelle à la population l’importance de vérifier la fiabilité des sources des articles, mais aussi des vidéos. À l’avenir, elle sera appelée à se méfier de la véracité de ce qui circule sur Internet.
Photomontage par Lila Maître