Les nations du Pacifique ont entamé un processus de rapatriement de ces ossements, qui s’avère complexe aussi bien pour les institutions australiennes que pour les États du Pacifique.
Des centaines d'ossements d'habitant(e)s des îles du Pacifique sont conservés en Australie, ont dévoilé de récentes enquêtes des populations du Pacifique. Un choc pour ces populations qui ne soupçonnaient rien, et qui a entraîné des discussions autour du rapatriement des ossements et des artefacts pillés au cours du XIXe siècle.
Ribka Kintaro, membre du Conseil de Pulo Anna, ignorait que des restes humains de son île étaient étudiés à l’Université de Göttingen, en Allemagne, avant que l’établissement ne contacte le gouvernement palaois. « Nous étions vraiment choqués. Nous n’aurions jamais pu imaginer que des dépouilles aient pu être enlevées à notre île », déplore Mme Kintaro.
Selon la Dre Tarisi Vunidilo, ancienne archéologue fidjienne ayant collaboré avec des musées pour des rapatriements et professeure à la California State University, il s’agit d’un des premiers problèmes qui se posent : le fait « que [les habitants des îles du Pacifique] n’en savent rien ».
Quand ils et elles l’apprennent, les restitutions deviennent pour ces populations une forme de guérison, affirme la professeure Vunidilo. « Le retour des ancêtres est devenu un moyen de renouveau culturel pour encourager les jeunes générations à être fières de leur héritage », indique-t-elle.
Les freins au rapatriement
La Dre Vunidilo évoque la difficulté de s’assurer de la provenance exacte des ossements. « Les gens qui récupéraient les ossements écrivaient mal le nom de l'île en question. Et lors de certaines collectes, cent ans plus tard, le nom de l'île concernée était différent », renchérit-elle.
Le plus grand défi demeure le financement de ces opérations. « C’est du cas par cas. C’est une bonne chose que l’Australie ait financé le retour des restes du détroit de Torres, mais les Hawaïens ont dû financer le leur par eux-mêmes », souligne Mme Vunidilo.
L’ancienne archéologue croit que la législation sur les îles doit être plus stricte et que les campus devraient être autorisés à recevoir des artefacts pour faciliter les rapatriements. La capacité d’accueil représente également un obstacle. Pour les îles confrontées aux changements climatiques, la Dre Vunidilo évoque le rapatriement numérique, soit rendre les informations sur ces artefacts disponibles en ligne, et de connecter les bases de données des musées entre eux, comme une solution prometteuse.
Des avancées encourageantes
Mme Vunidilo souligne que les musées du Pacifique devraient jouer un rôle plus important dans les rapatriements. « Leur plus grande responsabilité est d’informer leur propre personnel de ce qu’est le rapatriement. S’ils disposaient d’une équipe solidement formée, cela rendrait leur travail beaucoup plus facile. »
Pour la Palaosienne Ribka Kintaro, « les musées [australiens] font déjà leur part, j’espère juste que les gouvernements feront leur part eux aussi. » Tarisi Vunidilo abonde dans le même sens en affirmant que « l’Australie répond à davantage de demandes que par le passé. L’Australie continue d’apprendre » de ses homologues européens, et de ses erreurs passées.
Photo: Sasithorn