Le profil précis de la momie du souverain égyptien Amenhotep 1er a été révélé, le 28 décembre dernier, par l’équipe d’archéologues de l’université du Caire, grâce à l’usage de la tomodensitométrie (TDM), une technique d’imagerie radiographique.
« Trente amulettes, une ceinture composée de 34 perles d’or et une excellente dentition » sont entre autres identifiables sur les reconstructions en images 2D et 3D, rapporte la professeure de radiologie, Sahar Saleem, à la tête du projet. La TDM a permis d’examiner le corps de la momie sans abîmer son embaumement.
Amenhotep 1er, dont le règne est estimé entre 1525 av. J.-C. à 1504 av. J.-C., est l’une des rares momies restées intactes depuis l’Égypte antique. Les derniers à avoir ôté ses bandes sont des prêtres-embaumeurs qui souhaitaient réparer des dommages 400 à 500 ans après sa momification, commente Sahar Saleem.
« Le déballage virtuel », comme l’exprime Mme Saleem, a d’ailleurs rejeté l’hypothèse qui supposait que les prêtres avaient démailloté le pharaon pour piller ses artéfacts.
L’examen en deux versions
« Il faut savoir ce que l’on cherche puisqu’il n’y a pas d’algorithme à momie. » — Andrew Nelson, directeur du département d’anthropologie à la Western University.
Sahar Saleem explique que la tomodensitométrie est l’évolution des rayons X. La machine qui découpe en centaines, voire en milliers d’images, le corps qui est en rotation sur lui-même. Les images, une fois rassemblées, forment une représentation 3D, « comme les tranches de pain qui forment une miche ensemble », décrit la professeure.
L’introduction des momies à la tomodensitométrie normalement utilisée en médecine sur des corps vivants « s’est imposée rapidement », précise le directeur du département d’anthropologie à la Western University, Andrew Nelson. C’est à Toronto, cinq ans après l’invention de cette technologie en 1972, que le premier test est réalisé sur le cerveau d’une momie, dit-il.
L’anthropologue, qui a souvent pratiqué des TDM sur des corps momifiés, explique toutefois que l’analyse ne se déroule pas de la même façon sur un corps hydraté et sur une momie. Les organes dépourvus d’eau sont plus petits, déformés et ne se situent pas aux endroits où l’appareil cherche habituellement. « Il faut donc savoir ce que l’on cherche puisqu’il n’y a pas d’algorithme à momie », dit M. Nelson en riant.
Examiner sans indisposer
Découvrir la composition des momies au moyen d’une TDM est une méthode presque instinctive pour Sahar Saleem et Andrew Nelson. Mme Saleem constate que « retirer une momie de ses bandes ruine fréquemment le style de momification et abîme le corps ». En ce qui a trait à la préservation de l’héritage culturel, le choix devient donc évident.
Certains projets de recherches déballent cependant les momies pour apercevoir des subtilités que la TDM ne discerne pas. La composition des tissus portés par la momie est notamment l’une de ces caractéristiques.
Utilisée dans d’autres branches de l’archéologie, la technologie de la TDM demeure coûteuse et difficile à obtenir pour la recherche. À ce sujet, Andrew Nelson, lui-même détenteur d’une machine à microtomographie, offre souvent ses services à des collègues. « Je blague souvent en disant qu’il n’y a rien que je ne scannerais pas », dit-t-il, le sourire en coin.
Photo: Victoria Boisclair