Les écuries de la Formule 1 ont pris d’assaut, en 2019, le Championnat du monde des courses virtuelles, la F1 Esports Pro Series. Leur présence a fait exploser tous les chiffres de ce sport en pleine expansion, avec notamment 500 000$ de prix partagés entre les concurrents (prize pool).
Absentes la première année (2017), les écuries de la F1 sont, depuis 2018, aux premières loges de ce championnat du monde de jeu vidéo. De jeunes pilotes, amoureux des circuits virtuels, sont leurs représentants officiels dans la compétition.
Mais avant d’intégrer les écuries, ils doivent faire leurs preuves durant l’intersaison. « Il faut participer à des championnats en ligne comme celui d’AOR (Apex Online Racing). Ces championnats sont regardés par les équipes Esports et c'est un bon moyen de se faire remarquer », comme le souligne le pilote de Red Bull Nicolas Longuet. Cette première étape ouvre la porte du Pro draft aux pilotes qui performent le mieux.
Le pilote français était parmi les 109 000 joueurs qui aspiraient à représenter les dix écuries en lice durant l’édition 2019, soit une augmentation de 65% en comparaison à la précédente saison, rapporte f1esports.com. De tous ces aspirants, seulement trente ont le privilège de défier les lois de la vitesse virtuelle, à raison de trois pilotes par écuries.
Suivie dans 123 pays dans le monde en 2017, la F1 Esports gagne toujours en popularité. Le 5 janvier dernier, 1,6 million de téléspectateurs ont suivi le sacre du pilote Tianyu Tang lors de la première édition de la finale du championnat régional de la Chine, indique le site officiel de la discipline. Cette victoire lui permet d’être qualifié au repêchage et ainsi espérer aller contester le champion en titre, le pilote italien David Tonizza.
Bonne vitrine pour les écuries
Recalé en 2018, Tonizza a convaincu Ferrari durant les présélections 2019. La Scuderia faisait alors ses grands débuts dans la compétition. Elle a fini sur la deuxième marche du podium au classement des constructeurs, en plus du titre de champion du monde de David Tonizza.
Tous les constructeurs en lice dans la traditionnelle Formule 1 ont leur filiale Esport. Une implication qui « leur permet de développer leur marque et d'obtenir de la visibilité [à l’instar de] Ferrari qui met de l'avant la Ferrari Driver Academy à travers cette compétition », analyse Julien Coderre, collaborateur à RDS. Avec 5,8 millions de téléspectateurs en ligne et un nombre cumulé de clics qui a atteint 169 millions durant la troisième saison, la F1 Esport Pro Series gagne en popularité.
« Nous devons faire attention aux articulations, à plusieurs parties de notre corps. Les bras et les mains sont [très] sollicités. Le retour de force du volant est similaire à [celui d’une] vraie voiture. On change de vitesse ou règle certains organes de la voiture au travers des commandes sur le volant des centaines de fois par course. [Nous nous entraînons] entre 8 et 10 heures par jour durant le championnat. Le dos est lui aussi sous surveillance. C’est pour cela que nous avons des programmes sportifs [strictes] à respecter. » - Nicolas Longuet
Certaines équipes font aussi appel aux pilotes Esports pour des « essais sur le même simulateur officiel qu’utilisent les pilotes », confirme Nicolas Longuet, qui précise que la pratique n’est pas encore observée chez Red Bull. Cette implication leur « permet de développer les équipements de sim racing que les pilotes utilisent pour s'entraîner hors-piste », renchérit M. Coderre. La F1 envisagerait même d’utiliser ces courses virtuelles pour « tester de nouvelles règles », avance le pilote français, dont l’objectif pour la nouvelle saison est simple : « Gagner le titre constructeur pour la deuxième fois de suite. »
Un jeu très lucratif
La popularité dans l’espace des sports de jeu vidéo de la F1 Esports n’est pas près de s’estomper. Déjà attrayante pour les partisans, elle le devient tout autant pour les compétiteurs, alors que David Tonizza a empoché une somme de 500 000 dollars pour sa victoire en 2019. C’est « le plus gros prize pool des jeux de sa catégorie, explique Julien Coderre. FIFA, en 2018 par exemple, en offrait un de 400 000 dollars. La plus récente compétition de Madden (Championnat de NFL) avait quant à elle un prize pool de 100 000 dollars. C'est certain que ça contribue à augmenter la popularité de la série, étant donné que le prix final est plus gros », compare-t-il. Durant les deux précédentes éditions, la dotation était de 200 000 dollars.
La F1 Esports Pro Series est aussi un bon tremplin pour les pilotes qui envisagent de succéder à Lewis Hamilton et les autres pilotes de la Formule 1. À l’instar d’Enzo Bonito ー vainqueur de la Race of Champions 2019 devant des pilotes confirmés ー ou d’Igor Fraga, qui débarquera dans la Formula 3 cette année, les as du virtuel ne se privent pas de ce rêve.
Photo par Marius Gellner