Le lundi 7 décembre 2020, le Comité international olympique (CIO) annonçait officiellement l’entrée du breakdance au programme des Jeux olympiques de Paris 2024. À la fois une discipline culturelle, sportive et artistique, c’est un vent de modernité pour les Jeux olympiques et une reconnaissance pour les arts de la rue.
Années 70, New York. Un nouveau style de danse acrobatique voit le jour : le breakdance. Ce mélange de pirouettes et de mouvements au sol puise ses racines dans les arts martiaux, notamment dans la capoeira, un art martial afro-brésilien. Le DJ jamaïcain Kool Herc remarque que les gens dansent de façon plus énergique selon certains extraits des musiques qu’il passe et décide d’isoler ces passages et de les répéter, créant ainsi un genre de musique électronique appelée le « break », qui donnera son nom au breakdance.
Lahcen Mustapha, professeur de danse depuis 1999 et coordinateur de breaking pour la France aux Jeux olympiques de la Jeunesse de Buenos Aires en 2018, a découvert le hip-hop à travers les vidéoclips de Michael Jackson en 1982 : « À l’époque, il n’y avait pas Internet, on apprenait avec les clips à la télévision. […] C’est grâce à l’émission télévisée française H.I.P. H.O.P. animée par Sidney et diffusée sur TF1 dès 1984 qu’on s’est rendu compte que les chorégraphes de Michael Jackson faisaient du breakdance. » Celui-ci fait officiellement son entrée au programme de Paris 2024, comme annoncé par le CIO le 7 décembre dernier.
En 2020, Lahcen Mustapha lance « Et toi en 2024? », une plateforme regroupant des danseurs et danseuses amateurs et amatrices qui témoignent de ce que le breakdance a changé dans leur quotidien.
Il affirme que « le breakdance est issu des quartiers, et cette discipline a tellement évolué qu’elle s’est retrouvée dans les théâtres, les défilés de mode, la publicité et maintenant aux Jeux olympiques. Le but, c’est de prouver que même quand on commence en bas de l’échelle, avec du travail et de la discipline, on est tous capables d’accomplir de grandes choses ».
La championne de breakdance, Carlota Dudek, raconte que ce sport a apporté une stabilité dans sa vie. « De nombreuses valeurs émergent du breakdance, comme la confiance en soi, la détermination, l’échange et le partage. Ça m’a permis de m’affirmer et de vaincre ma timidité et c’est aujourd’hui ma passion et mon métier ; c’est ce qui m’anime et me définit. »
Les sports urbains s’invitent à Paris 2024
En juin 2016, le CIO a approuvé l’ajout de l’escalade, du skateboard et du surf au programme des Jeux olympiques de Tokyo 2020. Le breakdance a rejoint ces sports urbains quatre ans plus tard. « L’ajout du breakdance aux Jeux olympiques représente un enjeu de taille, c’est symbolique pour notre discipline née dans le Bronx puis qui s’est popularisée à travers le monde », témoigne Carlota Dudek.
Selon la journaliste de Radio-Canada Marie-José Turcotte, « en plus des sports traditionnels, on a maintenant la possibilité de faire un choix “à la carte” pour plaire au pays organisateur et s’assurer que la population locale y trouve un intérêt national. » Néanmoins, le breakdance était présent aux Jeux olympiques de la jeunesse de Buenos Aires en 2018 et a été très bien accueilli, comme l’explique le coordinateur et entraîneur de l’équipe de France de breakdance Mustapha Abdel :
« Les Jeux olympiques de la jeunesse ont été une première entrée. La dimension artistique et culturelle de la discipline à travers la musique jouée lors des battles a permis de rendre visible la culture hip-hop, et ça a beaucoup plu ».
L’édition des Jeux olympiques qui viendra après Paris 2024 se déroulera à Los Angeles, en 2028. Concernant la présence du breakdance à ces Jeux, les avis sont unanimes. Jean-Patrick Balleux, un autre journaliste de Radio-Canada, pense que « le breakdance est une discipline très américaine, [et qu’]il ne serait pas étonnant de voir la discipline au programme des Jeux olympiques de Los Angeles 2028 ». Son collègue Robert Frosi, confirme que « quand on voit le succès remporté à Buenos Aires en 2018, il est clair qu’il y a de l’avenir. La Californie a participé à l’histoire du breakdance, il y aura forcément un attrait pour les commanditaires ».
Un vent de modernité
Ajouter de nouvelles disciplines olympiques au programme permettrait d’attirer la jeunesse et de moderniser les Jeux. Selon Marie-José Turcotte, « le Comité international olympique se donne une image plus “cool” et espère voir beaucoup plus de jeunes adhérer aux Jeux olympiques comme athlète ou spectateur ».
Tony Estanguet, athlète international et président du Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 affirme que « le programme ainsi enrichi est le reflet de l’identité des Jeux de Paris 2024 et projette l’expérience des Jeux plus loin en proposant de nouveaux sports tournés vers la jeunesse, qui tissent des liens avec la culture, qui invitent à l’engagement et qui font appel à la créativité ».
Crédit-illustration: Malika Alaoui