Autoproclamés dalits, ou «opprimés» en hindi, les intouchables représentent historiquement la plus basse caste dans l’hindouisme. Malgré la multiplication des mouvements qui luttent pour leurs droits au cours des dernières années, l’exclusion sociale et l’accès aux études supérieures restent des enjeux réels pour les 200 millions de dalits en Inde.
Pour comprendre ce système de castes indiennes, il faut s’intéresser à l’hindouisme. «Le mot caste [est] dérivé du portugais casta qui signifie “espèce, race” ou “pur, non mélangé”», explique la journaliste française Mathilde Loire du média web Asialyst. Elle ajoute que «les Indiens, eux, utilisent plutôt [le mot] varna.» Celui-ci signifie «couleur» et renvoie à un système hiérarchique nommé Purusha qui comprend quatre varnas et qui correspond aux parties du corps de l’être primordial, d’où proviennent tous les humains. Les intouchables seraient nés de la terre et non de l’être primordial, ce qui ferait d’eux des «impurs».
Discrimination à l’université
Cette étiquette d’impureté amène les dalits à souffrir d’exclusion sociale sous différentes formes. Même si la Constitution indienne impose un quota de 15% de sièges réservés aux dalits dans les universités, la discrimination perdure. Le chercheur et auteur du livre Faces Of Discrimination In Higher Education In India, Samson Ovichegan, explique que «la plupart des formulaires d’admission exigent l’affiliation “castéiste” des candidats. [...] Le système d’admission peut alors facilement maximiser le nombre de non-dalits acceptés et plaider par la suite que le nombre de candidatures dalits était insuffisant pour satisfaire le quota.»
Cette discrimination en milieu académique prend parfois une forme encore plus tragique. Le suicide de l’étudiant militant, Rohith Vemula, le 17 janvier 2016, avait connu un retentissement médiatique international et relancé le débat sur la discrimination selon la caste. Très actif au sein d’une organisation étudiante qui lutte pour les droits des dalits et autres groupes opprimés en Inde, le jeune Indien s’était vu suspendre son allocation mensuelle en juillet 2015 par son université.
Celle-ci s’était défendue en évoquant un «délai dans les procédures administratives». Des manifestations à l’échelle nationale ont eu lieu, Vemula étant devenu le symbole de la discrimination des grandes universités envers les castes inférieures. Son cas n’est toutefois pas isolé. Le journaliste Ajit Kumar Jha mentionne dans un article publié dans le magazine India Today que, depuis 2007, 23 étudiants dalits aux études supérieures se sont enlevé la vie, souvent après avoir été victimes de harcèlement de la part de leurs collègues et même de leurs professeurs.
Les intouchables et les basses castes constituent toutefois une base électorale si nombreuse que les partis politiques actuels tentent de les solliciter activement, selon Mme Loire. Les dalits verront donc peut-être leur situation s’améliorer dans les prochaines années.