Peu d’industries internationales participent au commerce de parties du corps humain, mais la lucrative industrie des perruques et des rallonges naturelles fait figure d’exception. La fabrication de ces produits, principalement basée en Chine, est difficilement traçable, laissant la clientèle dans l’incertitude.
Selon des données publiées par l'Observatoire de la Complexité Économique (OCE), la Chine a exporté 1,41 milliard de dollars en cheveux humains en 2023. Le rapport de Recherche sur l’Industrie de l’Exportation de Perruques en Chine de 2020 à 2024, estime que le plus grand consommateur de perruques est l’Amérique du Nord, qui représente 62% du marché mondial.
La Chine elle-même est une grande consommatrice de perruques. « Le ménage moyen en Chine possède deux perruques chez lui », explique Arthur Ramlal, consultant des Pays-Bas pour la China International Hair Fair. Il explique que le marché chinois est si important en raison du grand nombre d’habitant(e)s et de la normalisation de l’utilisation de ces produits. « Il n'y a aucun tabou pour les hommes qui portent des perruques », illustre-t-il.
Donneuses de cheveux : les racines de l’industrie
Selon l’OCE, la Chine est la principale cliente de l’Inde, qui est le plus grand producteur de cheveux naturels au monde grâce à ses temples qui revendent les cheveux coupés en offrande aux dieux et déesses hindou(e)s.
Pour Arthur Ramlal, les femmes qui vendent leurs cheveux ne sont pas exploitées : « Celles qui veulent le faire se rendent [chez le] collecteur qui passe dans leur village, puis elles se font couper les cheveux et reçoivent un paiement », assure-t-il.
Il indique que les cheveux les plus prisés par les fabricant(e)s sont les « cheveux vierges ». Ils proviennent des jeunes Chinoises, habituellement âgées de 15 ou 16 ans.
Le consultant concède cependant que certains parents forcent peut-être leurs filles à vendre leurs cheveux. « C'est ainsi que sont les gens. »
Des étiquettes à prendre avec des pincettes
Selon M. Ramlal, il est impossible de s’assurer que la récolte de cheveux ait été faite volontairement à partir de l’étiquette du produit. Il faudrait « aller chercher l’histoire du vendeur, du revendeur, de l’entrepôt et de l’usine ».
Il ajoute que les étiquettes sont peu fiables : « Les vendeurs donnent parfois le nom de “cheveux chinois’’, “cheveux indiens” ou “cheveux vietnamiens’’, mais c’est impossible à vérifier avec l’étiquette de l’emballage, il n’y a pas de certification qui prouverait l’origine des cheveux. »
Le consultant renchérit en expliquant qu’il peut être compliqué pour les usines d’identifier la provenance des cheveux, car ils sont parfois mélangés et combinés dans le même lot.
M. Ramlal juge que l’industrie évolue dans la bonne direction : « Les compagnies savent que les acheteurs occidentaux valorisent les cheveux issus de sources éthiques. On voit donc des changements émerger en Inde et en Chine à ce sujet. »
Photo: Taha @exploringzhongguo