En plus de la résistance corporelle, la force mentale est essentielle chez les combattants de haut niveau. Avant de se concentrer sur la rage de leur adversaire, ceux-ci doivent être en mesure de maîtriser celle qui sommeille déjà en eux.
Le champion des poids légers de l’Ultimate Fighting Championship (UFC), Khabib Nurmagomedov, l’a appris à ses dépens lors de l’UFC 229. Face à Conor McGregor, un as de la provocation, le combattant russe est complètement sorti de ses gonds. Enragé par les commentaires déplacés et islamophobes de McGregor et de son équipe, Nurmagomedov a enjambé la structure métallique entourant l’octogone pour s’en prendre à Dillon Danis, le partenaire d’entraînement de son adversaire irlandais.
Se basant sur la pensée du psychologue Jordan Peterson, le Québécois Charles Jourdain, qui évolue lui aussi dans l’UFC, arrive à appréhender cette réaction : « nous avons tous cela dans notre ADN. Nous avons un aspect de survie et un aspect un petit peu plus monstrueux […] [Si ce dernier] n’est pas sous contrôle, c’est dangereux pour toi et les gens qui t’entourent », avance Jourdain.
Attiser le feu
Conscients de cette dissension personnelle chez leur adversaire, plusieurs boxeurs et combattants ultimes tentent de la raviver verbalement. D’après le consultant en performance mentale Jamie Rebner, si un combattant présente une forte hostilité envers « ce qu’on lui dit, il pourrait être plus porté vers l’agressivité et à sortir de son plan de match. » Les insultes, ou le trash talk, sont donc très fréquentes lors des combats et des conférences de presse.
Le caractère provocateur de certains, dont Conor McGregor, leur a même permis de se hisser au sommet mondial et de s’attirer une grande attention médiatique. Aux yeux de M. Rebner, le trash talk n’est pas qu’un exercice mental : c’est aussi une technique de vente. Sur ce point, Yvon Michel, promoteur de plusieurs vedettes de la boxe québécoise et nord-américaine, n’est pas d’accord : « Nous n’encourageons jamais ça. Nous ne demandons jamais ça. Nous n’organisons jamais ça. »
Maître de soi
Selon une étude de l’Université de Bangor, au pays de Galles, la colère améliore les performances jusqu’à 25%. Celle-ci doit cependant être retenue et libérée uniquement au moment opportun.
Lorsque insulté, il peut être difficile pour un combattant de garder son sang-froid. Pour Jamie Rebner, la clé est la visualisation. À l’aide d’un spécialiste en psychologie du sport, l’athlète doit être en mesure de galvaniser son « monstre intérieur » pour apprendre à le surmonter et à s’en servir à point nommé.
Aujourd’hui en parfait contrôle, Charles Jourdain se considère chanceux d’avoir connu les sports de combat. Sans eux, il croit que « cette espèce de rage, cette puissance qui sommeille en [lui l’]aurait peut-être amené à faire des choses très négatives, à des conflits physiques et verbaux ».
Photo par Laurence Taschereau