Les États-Unis ont vu le plus haut taux de participation des 18 à 29 ans aux dernières élections présidentielles depuis 1978. Cette tranche d’âge a toutefois été celle ayant le moins voté. Est-ce une preuve d’un manque d’engagement de la jeunesse, malgré ses moult revendications envers la vie politique de la plus grande nation du monde?
Ce serait plutôt le symptôme d’une jeunesse dépossédée par la véritable gérontocratie qui les gouverne.
Le Congrès des États-Unis compte davantage de membres de 77 ans et plus (l’espérance de vie moyenne d'un Américain) que de membres âgés de 38 ans et moins (l’âge médian du pays). L’âge moyen au Congrès en 2023 était de 58 ans. Notons également que les deux seuls candidats envisagés pour les prochaines élections, Joe Biden et Donald Trump, ont respectivement 81 et 77 ans.
Le dirigeant moyen a une vingtaine d’années de plus que l’Américain moyen… et quelques millions de dollars aussi.
Les vampires américains
Ces véritables vampires des temps nouveaux seraient derrière un système qui met en œuvre « une série de politiques qui transfèrent la richesse des jeunes vers les vieux », comme le dit si bien l’économiste américain Scott Galloway. Si ces respectables aînés sont toujours au pouvoir, c’est aussi parce que les systèmes qui les gardent en place sont conçus et alimentés pour empêcher les jeunes d’y participer.
En effet, une grande majorité des projets de loi du passé et du présent visant à restreindre l’accès au vote, comme le redécoupage des comtés électoraux ou l’empêchement du vote par anticipation, cible les populations les plus vulnérables, soit les jeunes et les minorités ethniques.
L'âge le plus commun de ces groupes (27 ans) est nettement plus bas que l’âge moyen des Américains blancs (58 ans), selon un recensement du Pew Research Center de 2019.
Ce sont les jeunes sans voix qui vivront le plus les conséquences des législations passées par leurs dirigeants gérontocrates. On pense entre autres à des projets comme le renversement de Roe c. Wade qui protégeait l’accès à l’avortement dans la constitution américaine.
On peut penser sinon aux réformes sur l’éducation qui bannissent les livres à tour de bras.
Riche comme Crésus
Cette élite, qui ne rajeunit pas, prend des décisions dévastatrices pour les générations futures et refuse de céder sa place. Mais pourquoi?
Parce qu’être politicien aux États-Unis rend riche comme Crésus. On parle de fortunes s’élevant à plusieurs millions de dollars alors que le salaire annuel au Congrès est de 174 000 $.
Ce serait grâce à ce que certains, comme Scott Galloway, soupçonnent d’être du « insider trading ». Le délit d’initié, en français, consiste à faire des échanges à la bourse avec de l’information privilégiée et inaccessible au public. C’est un crime passible de 15 ans de prison.
Le STOCK Act, mis en place pour éviter de tels délits, oblige les membres du Congrès à rendre publics leurs échanges. La pénalité prévue pour un manquement à cette loi n’est qu’une amende de 200$.
Et c’est dans les temps les plus difficiles que cette classe dirigeante s'enrichirait le plus. Par exemple, durant la crise économique de 2008, leur fortune aurait augmenté de 16% de plus qu’à l’habitude, alors que des centaines de milliers d’Américains ont perdu leur travail.
Avec tout cela en tête, on comprend un peu mieux pourquoi la jeunesse américaine se dit « à quoi bon? ».
Illustration : Pixabay