La Corée du Sud trône au sommet des pays consommateurs de balados dans le monde, selon une étude menée par l’Institut Reuters et l’Université Oxford en 2018. Le contexte socioculturel sud-coréen des années 2010 a poussé ce peuple de l’Asie de l’Est vers des médias alternatifs comme la baladodiffusion.
Au moment de l’étude de Reuters-Oxford, 58% de Sud-Coréens avaient écouté au moins un balado dans le dernier mois. La Corée du Sud devançait deux autres pays de l’Asie de l’Est, soit Hong Kong (55%) et Taïwan (47%), les deuxième et troisième plus grands consommateurs de balados au monde. À titre indicatif, les nombres descendent à 33% aux États-Unis et à 28% au Canada.
Le professeur du cours Créer un podcast à l’École nationale de l’humour et concepteur de contenu, Yan Thériault, définit son moyen de communication de prédilection ainsi : « À la base, c'est une technologie et non pas la définition d'un nouveau "contenu". Le podcast était une façon automatique de charger son lecteur mp3 des meilleures émissions audio auxquelles nous étions abonnés ». Dans son esprit, le terme balado s’est tranquillement détaché de sa définition initiale. « Certains le voient comme du contenu indépendant, d'autres comme du contenu exclusivement sur le web. Certains même pensent que ce sont des "entrevues audio" alors qu'il n’en est rien », dénote-t-il.
Les pionniers de la baladodiffusion sud-coréenne
La présence d’un gouvernement conservateur en Corée du Sud a poussé des créateurs de contenu vers la baladodiffusion au tournant des années 2010.
En 2011, l’émission Naneun Ggomsuda ou NaGomSu (Je suis rusé, en français) a été lancée sur iTunes et téléchargée plus de 6 millions de fois depuis. Il est aujourd’hui convenu qu’il s’agit de la genèse de la montée de l’écoute sud-coréenne des balados.
NaGomSu est une émission satirique couvrant l’actualité politique, sociale et culturelle du pays et se moquant ouvertement du gouvernement de l’époque. Kim Ou-joon, Choo Chin-woo, Kim Yong-min et Chung Bong-ju étaient alors les animateurs de ce nouveau format de discussion enregistrée qui a été produit d’avril 2011 à décembre 2012. Chung Bong-ju, ancien député libéral, a d’ailleurs été emprisonné à l’époque pour des propos qu’il avait tenus dans le balado. Il avait notamment évoqué le passé frauduleux du président en poste à ce moment, Lee Myung-bak. L’homme politique a, par la suite, été reconnu coupable des crimes évoqués par Bong-ju.
La popularité du balado n’a fait qu’augmenter à la suite de ce scandale. Les producteurs de balados ont gagné la sympathie du public sud-coréen, en plus de trouver un créneau dans la liberté offerte par ce moyen de communication non contrôlé par des radios d’État. Comme ce sont des produits web, le gouvernement peut difficilement s’en mêler.
Facilité d’accès
Cet engouement s’est traduit par l’apparition d’autres balados de tout genre, malgré une prédominance pour le suivi de la politique, de manière comique ou non. La facilité de production des balados a permis aux Sud-Coréens d’évoluer aisément avec ce média.
S’il est « facile » à réaliser, il est encore plus facile à consommer aujourd’hui, selon Yan Thériault, le réalisateur du balado le plus écouté au Québec, Mike Ward sous écoute : « Plus besoin d'attendre une date ou une heure précise. Tout le monde a maintenant un téléphone intelligent et peut consommer ce qu'il veut, où il veut. »
Photo par Nicolas Fivel