Le cinéma d’animation devient un outil prisé par des pays pour faire rayonner leur culture à l’international: Mavka, film adapté d’un récit du folklore ukrainien, espère transmettre au grand public des valeurs environnementales et lui faire découvrir les traditions et paysages du pays.
« Nos histoires ont leurs propres couleurs et nous apprenons à les transmettre à un public international », révèle Oleg Malamuzh, natif d’Ukraine et réalisateur de Mavka.
En plus d'avoir une esthétique basée sur des paysages de réels emplacements ukrainiens, Mavka sensibilise le public à la préservation de la nature par des animaux en voie d'extinction qui habitent ses forêts animées, comme le lynx, le bison, la cigogne noire et l’ours brun. Le projet Mavka est d’ailleurs soutenu par le Fonds mondial pour la nature (WWF), le ministère de la culture d’Ukraine et l’Agence d'État ukrainienne pour le cinéma.
Mavka, en devant concilier son amour pour un humain et son rôle de gardienne de la forêt, inscrit le film éponyme dans la volonté du pays de créer une série d’images de femmes fortes pouvant braver les obstacles.
Ce film pourrait devenir un marqueur culturel pour l’Ukraine, et un moyen pour les pays d’ailleurs d'accéder à la culture locale, selon Nicolas Brault, cinéaste et professeur assistant spécialiste du cinéma d’animation à l’Université Laval.
L’animation: intemporelle et polyvalente
Mavka est inspiré de la pièce de théâtre Le chant de la forêt, écrite en 1911 par Lessia Oukraïnka, figure ukrainienne de féminisme et d’activisme public et culturel.
Toutefois, le film n’est pas une reproduction exacte de l'œuvre, à l’origine plutôt dramatique; M. Malamuzh explique qu’une fin heureuse et de nouveaux personnages ont été créés spécialement pour le jeune public. Des éléments d’action ou d’humour ont aussi été ajoutés pour que tout le monde puisse s’y intéresser.
Selon M. Brault, certaines histoires se racontent uniquement par l’animation. « Les techniques de mise en mouvement d’images existent depuis qu’on est humains », soutient-il. Pour lui, l'animation a toujours été un moyen de faire passer des messages sociaux ou de porter des valeurs culturelles, de façon délibérée ou pas. Il est, pour lui, « impossible » de faire autrement, puisque l’animation est une interprétation du réel et laisse place à une subjectivité totale.
Un pays animé de culture
M. Malamuzh travaille actuellement sur le développement de l’industrie de l’animation en Ukraine, qui avait le plus grand studio de l’Europe de l’Est il y a quinze ans. Il souligne le talent des artistes locaux et espère que de grands studios viendront ouvrir leurs filiales au pays.
Il insiste aussi sur l’unicité de ses productions: « À l’aide de notre style visuel inspiré de notre culture, nous pouvons raconter plus de choses sur notre pays. » Par exemple, les costumes des personnages de Mavka sont ornés d’éléments fantaisistes, de motifs traditionnels et d’allusions à la nature et au folklore de l’Ukraine.
M. Malamuzh espère que son lieu d'origine et les histoires qui l’animent interpelleront un public de partout: « J’aimerais que l’Ukraine soit perçue comme un pays accueillant et culturel, où vivent beaucoup de personnes créatives qui ont une histoire à raconter et à partager avec le monde entier. »
Photo : Camille Dehaene