En Zambie, les problèmes en approvisionnement d’électricité ainsi que le manque de financement freinent la transition vers l’utilisation d’énergies renouvelables. Bien que parfois moins vertes, d’autres sources d’énergie, telles que du pétrole fait de pneus, s’implantent peu à peu dans le pays en développement.
« La demande de la population est grande et ce que nous produisons n’est pas assez pour y répondre », explique en entrevue le maître de conférences au département de génie agricole à l’université de Zambie Mwansa Kaoma. Si moins d’un cinquième de la population en milieu urbain n’avait pas accès à l'électricité, 86,1 % de la population rurale en était dépourvue en 2019, d'après les données de La Banque mondiale.
« Dans les régions urbaines, il serait possible d’augmenter l’accès à l’électricité parce que les infrastructures pour la produire sont plus développées. Il faudrait tout simplement élargir les lignes électriques pour les amener vers la population », souligne M. Kaoma. Il précise néanmoins que les coûts pour fournir cette électricité en milieu rural seraient très élevés étant donné que les gens sont éloignés les uns des autres et vivent à distance des infrastructures.
Du pétrole un peu plus écologique
L’entreprise Central African Renewable Energy Corporation utilise des pneus en caoutchouc et du plastique afin de produire ce qui ressemble à du pétrole brut, utile à la confection d’essence et de diesel. Pour ce faire, les matériaux nécessaires sont brûlés, déclenchant une réaction chimique. Il sont ensuite mélangés avec un catalyseur, ce qui permet de rendre les gaz d’échappement moins nocifs pour l’environnement.
« Je dirais que l’utilisation [de cette source d’énergie] est meilleure pour l’environnement puisque l’ensemble de notre pétrole est présentement importé », affirme Mwansa Kaoma. Il explique que tout le processus normal de fabrication et d’importation du pétrole a un effet beaucoup plus néfaste sur l’environnement que de simplement utiliser des pneus qui sont déjà dans le pays et d’en faire du pétrole.
Daniel Hoornweg, professeur associé à la Faculté des systèmes énergétiques de l’Institut universitaire de technologie de l’Ontario, émet cependant certaines réserves. « C’est une bonne idée, mais cela ne peut pas être mis à l’échelle de tout le pays. Il n’y a pas assez de déchets de pneus en Zambie pour fournir assez d’énergie et ainsi, remplacer le diesel et l’essence. Cela va remplacer une petite fraction, mais ce sera moins d’un pourcent », soutient-il.
Il ajoute d’ailleurs qu’il est possible « de faire du carburant avec n'importe quoi ». Pourtant, plusieurs questions restent en suspens pour le chercheur. « Combien est-il possible d’en générer? Quelle est la fiabilité [de la technique]? Combien cela coûte-t-il? », se demande M. Hoornweg.
Exploiter ses ressources naturelles
L’énergie renouvelable est produite à partir de ressources naturelles qui se renouvellent au rythme de leur utilisation. « Une fois les infrastructures nécessaires mises en place, on peut produire cette énergie qui est propre », explique la professeure à la Faculté de génie de l’Université d’Ottawa Elena Baranova.
« Évidemment, la plus grande source d’énergie renouvelable que nous avons est hydraulique », souligne Mwansa Kaoma. 85 % de l’électricité produite en Zambie provient de l’eau. Cependant, le pays a d’importants problèmes de sécheresse, ce qui réduit la productivité des turbines hydroélectriques installées dans les différents cours d’eau.
M. Kaoma met de l’avant d’autres solutions possibles pour produire de l’énergie propre : « Nous avons le soleil, nous avons du vent, mais c’est encore inexpérimenté, explique-t-il. Nous avons aussi la géothermie [et] la bioénergie. Cette dernière est d’ailleurs très utilisée. Le seul problème, c’est qu’elle est produite avec les manières traditionnelles qui sont assez néfastes pour l’environnement. »
« La Zambie est dévouée et déterminée à réduire ses émissions de GES. Des opportunités peuvent être trouvées tant à l’échelle nationale que mondiale » ー Junghwan Yoo, analyste régional pour le bureau africain du Fonds vert pour le climat
Coûteux, mais nécessaire
« La Zambie est dévouée et déterminée à réduire ses émissions de GES. Des opportunités peuvent être trouvées tant à l’échelle nationale que mondiale », remarque l’analyste régional pour le bureau africain du Fonds vert pour le climat, Junghwan Yoo. Malgré ce constat, le manque de financement est un important obstacle au développement des énergies renouvelables en Zambie.
« [Les pays qui développent leurs énergies renouvelables] sont indépendants de la guerre, de toutes ces multinationales qui vendent le pétrole, des prix élevés de l’essence. Développer leurs énergies leur donnerait donc de l’indépendance, mais aussi de la richesse », affirme Elena Baranova.
Photo : Malika Alaoui